Abbas Mahamat Tolli, candidat à la présidence de la Banque Africaine de Développement (BAD), a profité de son passage sur Africa 24 le 4 octobre 2024 pour clarifier sa vision de l’avenir de l’institution. Dans un contexte où les défis économiques pour l’Afrique sont de plus en plus pressants, Tolli a insisté sur l’urgence d’agir, tout en consolidant les acquis des mandats précédents. Ses propos révèlent une ambition claire : faire de la BAD un pilier central du développement économique africain, capable d’accélérer le rythme des réformes et d’accompagner la transformation du continent.
L’un des points majeurs soulevés lors de l’entretien concerne la pertinence de la BAD en tant qu’acteur financier majeur sur le continent africain. « Nous devons aller plus loin et plus rapidement », a affirmé Tolli, conscient que la Banque doit impérativement s’adapter à la complexité croissante des défis économiques mondiaux. Cette déclaration laisse entendre que, sous sa direction, la BAD adopterait une approche plus proactive, prête à anticiper les besoins des pays africains plutôt que de simplement réagir aux crises. Il semble également vouloir renforcer l’influence de la BAD sur la scène internationale, notamment en termes de mobilisation de ressources pour financer des projets ambitieux.
Abbas Tolli a également abordé un thème central de son programme : l’industrialisation de l’Afrique et la transformation des matières premières. « Si vous exportez vos matières premières, vous exportez aussi vos emplois », a-t-il martelé. Cette phrase résume l’un des grands dilemmes auxquels font face les économies africaines. Depuis des décennies, les matières premières africaines, que ce soit le pétrole, le gaz ou les minerais, sont exportées brutes, laissant la création de valeur ajoutée aux pays étrangers. Tolli plaide pour une nouvelle approche, visant à transformer ces ressources sur place et ainsi créer des emplois locaux, renforcer les économies nationales et assurer une meilleure intégration dans les chaînes de valeur mondiales.
Son expérience à la tête de la BEAC (Banque des États de l’Afrique Centrale) semble jouer un rôle clé dans sa candidature. Sous sa direction, la BEAC a connu une série de réformes qui ont permis de redresser les réserves de change et d’instaurer une plus grande transparence dans les flux financiers. Tolli a rappelé que ces réformes, bien qu’ambitieuses, ont permis de stabiliser les économies de la CEMAC (Communauté Économique et Monétaire de l’Afrique Centrale), tout en améliorant la gestion des ressources publiques. Il n’est donc pas surprenant qu’il veuille appliquer des réformes similaires à la BAD, en renforçant l’assise financière de la banque pour qu’elle puisse répondre aux défis des décennies à venir.
Il a d’ailleurs souligné que la capacité financière de la BAD est un enjeu majeur pour soutenir les projets de développement. « Il reste encore beaucoup à faire », a-t-il affirmé, tout en rappelant que pour atteindre les objectifs ambitieux du continent, la BAD doit être en mesure de mobiliser des ressources supplémentaires et de tisser des partenariats stratégiques avec des acteurs internationaux. Cette approche, qui repose sur une vision à long terme, est d’autant plus cruciale dans un contexte où les pays africains cherchent à diversifier leurs sources de financement et à réduire leur dépendance à l’aide extérieure.
Loin de se contenter d’un simple discours technique, Tolli a également mis en avant l’importance de la souveraineté économique du continent. « Nous devons croire en la capacité des Africains à relever ces défis », a-t-il déclaré. Ce message, qui résonne particulièrement dans le contexte de l’Agenda 2063 de l’Union Africaine, appelle les pays africains à prendre en main leur destin économique. Pour Tolli, la BAD doit jouer un rôle de leader dans cette dynamique, en soutenant des projets qui favorisent l’autosuffisance et en encourageant les États africains à valoriser pleinement leurs ressources.
En définitive, Abbas Mahamat Tolli présente une vision ambitieuse pour la BAD, qui va au-delà des simples réformes structurelles. Il s’agit pour lui de repositionner la Banque comme un acteur central du développement africain, capable de répondre aux besoins immédiats des États tout en anticipant les défis futurs. Son expérience à la BEAC, combinée à une compréhension profonde des enjeux économiques africains, en fait un candidat de poids pour la présidence de la BAD.