Un jour d’Aïd au Tchad : entre spiritualité, élégance et partages

Ph DR

Dès les premières lueurs du jour, les quartiers se remplissent d’une énergie rare. Les hommes sortent en jalabiyé fraîchement récupéré chez le tailleur, certains le complètent d’un kadamoul traditionnel noué au visage ou d’un taguiyé – ce petit bonnet brodé devenu symbole d’élégance silencieuse. Direction la mosquée pour la grande prière de l’Aïd. Ce moment suspendu où les voix se mêlent dans une unité douce, comme un rappel que malgré la fatigue du jeûne, la foi reste la même.

Puis vient le moment des salutations. On passe d’une maison à l’autre, on serre des mains, on s’étreint, on s’excuse parfois. Les enfants collectent les bénédictions – et quelques billets de fête. Les femmes offrent des kaak, ces petits gâteaux sucrés, symbole de joie et d’hospitalité. Le sucre est partout : dans le thé, dans les sourires, dans les souvenirs.

Mais ce serait trahir l’esprit de l’Aïd que de ne pas évoquer le marara. Cette viande de mouton préparée avec soin, découpée au couteau familial, souvent partagée sur un tapis, à même le sol. Le goût est celui de la fête, du sacrifice accepté, du jeûne terminé.

L’après-midi est faite de visites aux grands-parents, aux oncles, aux amis perdus de vue. On se revoit, on se redit qu’on est là, qu’on s’aime, même si on ne se le pas dit depuis longtemps.

À N’Djamena, Abéché, Sarh ou Moussoro, l’Aïd ne se vit pas seulement dans la prière. Il s’incarne dans l’élégance du geste, la chaleur des retrouvailles, la sincérité des visages. C’est un jour où les rancunes fondent, où les rires montent, où le pays semble, pour quelques heures, respirer ensemble.

Et quand le soir tombe, que le soleil se retire lentement derrière les toits plats, on sait qu’on vient de vivre quelque chose de précieux. Pas un simple jour férié. Un jour de paix.

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