Affaire Claustre : 51 ans après, retour sur l’enlèvement qui a révélé Hissène Habré au monde

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21 avril 1974, 21 avril 2025, cela fait 51 ans jour pour jour que la rébellion des Forces Armées du Nord (FAN), dirigée par Hissène Habré, s’est fait connaître au niveau international avec l’enlèvement de trois expatriés dans le nord du Tchad. Cet épisode, qui deviendra célèbre sous le nom d’affaire Claustre, a été un tournant dans l’histoire politique tchadienne. Retour sur cette page sombre des années 1970.

Le 21 avril 1974, à Bardaï, dans la région montagneuse du Tibesti, trois coopérants sont enlevés par des combattants du Conseil de Commandement des Forces Armées du Nord (CCFAN), une faction issue du FROLINAT (Front de Libération Nationale du Tchad). Les victimes sont le médecin allemand Christophe Staewen et deux Français : le coopérant Marc Combe et l’archéologue Françoise Claustre. Cette opération, médiatisée à l’échelle internationale, marque l’émergence d’un nom : Hissène Habré, chef militaire ambitieux et stratège politique redoutable.

À cette époque, le Tchad est plongé dans une guerre civile. Le pays est divisé entre le pouvoir central à N’Djamena, soutenu par la France, et les mouvements armés du Nord. Le FROLINAT, divisé par des luttes de leadership entre Abba Siddick, Goukouni Weddeye et Habré, éclate. Ce dernier, avec Weddeye, fonde le CCFAN et prend le contrôle du Tibesti.

L’affaire Claustre prend alors une tournure diplomatique. Habré exige une rançon de 10 millions de francs CFA en échange de la libération de Françoise Claustre. L’Allemagne accède à la demande et obtient la libération de son ressortissant. La France, quant à elle, commet une erreur stratégique en envoyant un ancien militaire colonial, le commandant Pierre Galopin, pour négocier. Mal accueilli, il est capturé, jugé sommairement et exécuté en avril 1975. Entretemps, Marc Combe parvient à s’échapper, mais Françoise Claustre reste captive pendant 33 mois.

L’archéologue est finalement libérée le 1ᵉʳ février 1977, en même temps que son mari, Pierre Claustre, ancien haut fonctionnaire français, capturé à son tour après être venu plaider sa cause.

Françoise Claustre, ethnologue et archéologue de renom, a consacré sa carrière à l’étude des cultures sahéliennes. Elle a notamment publié « Le gisement Sao de Mdaga » et « Sahara et Sahel à l’âge du fer : Borkou, Tchad ». Elle décède le 3 septembre 2006, mais son nom reste à jamais lié à cet épisode dramatique de l’histoire tchadienne.

L’affaire Claustre est aujourd’hui perçue comme l’un des événements déclencheurs de l’ascension politique de Hissène Habré, président du Tchad de 1982 à 1990.

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