Être au chevet d’un malade hospitalisé n’est pas du tout facile pour les âmes bienfaisantes à N’Damena. Entre l’état de santé des malades, les règlements des hôpitaux et les pressions du personnel soignant, les garde-malades gèrent quotidiennement le stress.
Dès l’aube, il faut s’activer et programmer la journée qui s’annonce. C’est la réalité des garde-malades qui sont aux côtés des patients du matin au soir dans les hôpitaux de la ville de N’Djamena. Pour certains, c’est pénible de vivre cela chaque jour, car être réveillé par des bruits d’une sonnette est une véritable torture. Abandonner son domicile et passer des semaines, voire des mois dans un hôpital où l’on entame quotidiennement sa journée de manière brutale peut aussi rendre malade à la longue.
« Depuis quelques semaines, je suis dans cet hôpital avec ma mère. Je me réveille chaque matin très tôt, car il y a des exigences de cet endroit. Le pire c’est qu’il n’y a pas un espace particulier qui nous est réservé. Donc nous dormons dehors », nous révèle Memnelem Augustine, la trentaine entamée.
Au rez-de-chaussée d’un bâtiment de l’hôpital de référence nationale, chaque garde-malade a sa place. En journée, ils occupent des bancs dans les allées de l’hôpital. Les trouver allongés sur ces bancs pourrait laisser croire qu’il s’agit des malades. Les échanges musclés entre personnel soignant et garde-malades sont fréquents et inévitables. Que ce soit pour des raisons de produits non payés ou de non-respect de certaines consignes, garde-malades et personnel soignant se lancent dans des invectives.
L’autre point de mésentente repose sur les horaires de visite. Dans la plupart des hôpitaux de la capitale, déjà à 8h, les garde-malades doivent libérer la salle d’hospitalisation. Place au personnel soignant de vaquer ses occupations. Les garde-malades ne sont autorisés à regagner les salles que pour des cas de nécessité. Ce qui n’est pas du goût de beaucoup d’entre eux. Ils ne sont pas autorisés à répondre aux besoins des malades librement à cause du règlement restrictif qui insiste sur le respect des horaires. « J’ai failli gifler une infirmière ici la semaine passée à cause de son manque de respect. Elle m’a carrément ordonné de sortir de la salle en haussant le ton sur moi, tout simplement parce que je nourrissais mon malade affamé », déclare dame Yvonne, visiblement en colère.
Ainsi, pendant les heures de travail, les garde-malades, pour tuer le temps, se retrouvent entre eux pour échanger, certains s’accrochent à leurs smartphones, d’autres encore prennent le temps de se reposer.
De part et d’autre, les plaintes des membres de famille ou amis qui ont tout abandonné pour venir en aide à leurs proches souffrants se résument au mépris avec lequel le personnel des hôpitaux les traite. Ils sont reçus et servis en fonction des humeurs des brancardières.
« Être garde-malade n’est pas synonyme d’esclavage mais juste un signe d’amour et un attention qu’on prête à celui qui nous est cher. De plus, venir dans cet endroit pour passer des semaines dans des conditions de santé précaires, mérite un minimum de respect et des encouragements », ajoute un autre garde-malade au chevet de son frère.
Nadège Hountinto