Le 25 avril 2025, l’Office National des Médias Audiovisuels (ONAMA) a sorti une note circulaire pour interdire formellement à ses journalistes, réalisateurs, producteurs et collaborateurs d’accepter de l’argent, des cadeaux ou des avantages de la part des organisateurs d’événements couverts par les médias publics. Une décision saluée par certains, critiquée par d’autres, qui relance un débat ancien, mais toujours brûlant : celui des perdiems dans le journalisme.
Le journalisme repose sur des principes fondamentaux : indépendance, impartialité, honnêteté. Accepter de l’argent d’un tiers couvert dans un reportage ou un événement peut brouiller les lignes et jeter un doute sur l’objectivité du traitement. La décision de l’ONAMA s’inscrit dans cette volonté de protéger l’image des médias publics et d’affirmer une certaine rigueur professionnelle.
Certaines chartes, comme celle de la Fédération Internationale des Journalistes (FIJ), proscrivent déjà toute forme de rémunération extérieure pouvant influencer le travail journalistique. L’ONAMA, en posant des sanctions sévères, va plus loin : elle tente de rompre avec une pratique devenue trop banale.
Sur le terrain, la réalité est toute autre. Le paiement de perdiems aux journalistes lors des ateliers, conférences, ou cérémonies est une pratique largement répandue dans plusieurs pays africains, y compris au Tchad. Ces sommes, souvent modiques, sont présentées comme un soutien logistique ou un remboursement de frais de transport. Pour beaucoup de journalistes mal payés, c’est même une manière de « survivre ».
Certaines ONG, institutions et organisateurs intègrent systématiquement ces perdiems dans leurs budgets de communication, parfois à la demande même des journalistes. Ce système, bien qu’accepté tacitement, fragilise cependant l’indépendance du journaliste.
La vraie question est là : comment exiger une rigueur éthique dans un secteur où les conditions de travail sont souvent précaires ? Peut-on interdire les perdiems sans améliorer les salaires, sans assurer le remboursement des frais de terrain, sans moyens logistiques pour couvrir un événement ?
En interdisant catégoriquement toute forme de compensation externe, l’ONAMA pose un principe, mais évite peut-être un débat plus large : celui de la professionnalisation réelle du métier, de la revalorisation du travail journalistique et de l’accompagnement structurel des médias publics.
Cette circulaire est-elle un pas vers une presse plus crédible ou une mesure déconnectée des réalités du terrain ? Le débat reste entier. Entre rigueur déontologique et survie économique, les journalistes se retrouvent une fois de plus à la croisée des chemins.