Nouvelle ville : un projet réaliste et réalisable ou l’expression de la « folie de grandeur » ?

Par un arrêté signé le 10 juillet 2024, le Ministre de l’Aménagement du Territoire, Mahamat Assikeck Halata, met en place une Commission qui doit étudier les possibilités de création d’une nouvelle ville au Tchad. Le document a fait un tollé et plusieurs Tchadiens ont exprimé leur désaccord.

Depuis plus de 72 heures, les citoyens tchadiens rappellent que N’Djamena est inondée et n’a aucune infrastructure digne des 64 ans du Tchad. D’autres vont plus loin, virulents, et déclarent que les autorités tchadiennes se foutent des populations meurtries par la pauvreté et les aléas catastrophiques liés aux pluies. 

Pour Amine Idriss, Analyste Économique et Politique tchadien, il s’agit d’une sortie pour éloigner l’opinion publique de l’état actuel de la capitale. « Le technicien batakoumba qui a suggéré cette idée de « ville nouvelle » ou « nouvelle ville » est un génie… plus personne ne parle des inondations… », a-t-il ironiquement martelé. Il affirme ainsi que c’est une volonté de taire les crises actuelles liées aux inondations.

Aussi, certains citoyens mettent en avant des questions « plus urgentes » : les dettes, les chantiers inachevés de la capitale et des autres grandes villes, etc. « Ceux qui proposent la construction d’une nouvelle ville ne sont pas en phase avec les réalités factuelles de notre pays », regrette Ousmane Abdramane Djougourou, haut fonctionnaire et ex-secrétaire général de la Présidence. Il ajoute qu’un tel projet va énormément coûter au pays déjà endetté.

Un autre Analyste, Économiste et Statisticien tchadien, Djoret Biaka, s’insurge contre tout projet de remplacement de la ville de N’Djamena. « Laissez ma capitale, N’Djamena, là où elle est ! Le problème n’a jamais été la géographie. Le problème, c’est l’histoire des détournements, de l’absence de vision, de qualité ou d’absence d’infrastructures ! Ne nous distrayez pas ! ».

Mais cette idée de remplacement est balayée d’un revers de la main par la présidente de la Commission chargée de la création de la ville nouvelle, Rayhana Adam Saleh. « Il ne s’agit pas de remplacer la capitale N’Djamena, mais plutôt de réfléchir sur la création d’une ville nouvelle qui sera une extension de l’actuelle capitale », dit-elle.

Tout porte à croire que les Tchadiens dont les cris ne sont souvent pas pris en compte dans les grandes décisions et lignes politiques doivent attendre la réalisation de ce projet pharaonique pour y croire. Les questions ne cessent de pleuvoir  : construire une nouvelle ville avec quels moyens ?  Où sera-t-elle construite ? Qu’en est-il des Tchadiens menacés par la famine et sinistrés ? Pourquoi ne pas tout simplement reconstruire N’Djamena, drainer les eaux pluviales et faire de ce manque cruel d’électricité un lointain souvenir ?

Quitter la version mobile