La gratuité des cours dans les établissements scolaires publics tant clamée par le ministère en charge de l’éducation nationale s’observe dans certaines écoles par des conditions peu favorables tant pour les enseignants que les élèves. À l’école officielle et communale de Dembé, le constat est bien plus qu’alarmant.
Nous sommes à l’école officielle et communale de Dembé, dans le 6ᵉ arrondissement de la cité capitale. Il est environ 7 heures ce lundi 27 novembre 2023. Un nouveau jour, une nouvelle semaine que les élèves de cette institution éducative espéraient la meilleure pour une reprise de cours. Sacs au dos pour certains, et pour d’autres, des sachets plastiques contenant de quoi prendre note en classe. De loin, l’on pouvait apercevoir un enfant, la dizaine approximativement, avec sur sa tête un tabouret, ses ardoise et cahier sous ses aisselles.
Ils sont tous enthousiastes, ces jeunes élèves, qui, grâce à leur regard innocent, exprimaient le désir de rejoindre leurs salles de classes. Un désir tant accentué chez certains qui décident de faire le tour de l’établissement, question d’être surpris par une bonne nouvelle, comme quoi, « regagnez votre classe » par exemple. Mais de quelles salles de classe parle-t-on ? Celles dans lesquelles « les enfants restent à même le sol. Quelques fois pour les tous petits, la direction achète des nattes. Pour les grands, comme ils ne peuvent pas s’asseoir sur des nattes parce que c’est difficile pour eux de prendre notes dans ces conditions, certains viennent avec des petits bancs. D’autres aussi s’arrangent avec des briques. Chacun se débrouille comme il peut », témoigne Madjilom Costa, Directeur de l’école de Dembé.
Deux gros bâtiments délabrés, laissés à la merci de la mère nature, sans portes, sans fenêtres et encore moins sans tables et bancs. Pour un établissement scolaire, il n’y a que ce tableau noir, au fond de chaque classe qui nous rappelle que nous sommes dans un environnement éducatif. Entre les va et vient des commerçants qui vont à la recherche de leurs marchandises dans les magasins au sein de l’établissement, des commerçants ou vendeurs ambulants qui se sont fait une place sous les arbres de l’école, les consommateurs des excitants notamment avec leur bouteille de colle à la bouche, l’école officielle et communale de Dembé n’est plus une case pour les élèves. Chacun y trouve pour son compte. « A l’école communale, la maîtresse vient le matin et constate que les bandits dorment carrément dans la salle. Et comme elles ont pour la plupart peur, elles attendent que les hommes viennent. Chaque matin, il faut négocier au moins 5 ou 10 minutes avant d’avoir accès à la salle. Parce que quand tu vas demander à un bandit de libérer la salle, il te dira qu’il est fatigué ou qu’il ne sort pas tout simplement » raconte un habitué des lieux.
Une réalité qui se manifeste avec force dans une école en pleine capitale, sous le regard impuissant des responsables. « Les portes et les fenêtres ont été arrachées par les bandits du marché. Et ce sont toujours eux qui ont cassé et vendu les tables et bancs qu’il y avait. Sinon, au début, les classes étaient équipées », tente d’expliquer le directeur de l’école de Dembé. Pour lui, « les portes et fenêtres qu’on pose ne sont pas de bonne qualité, raison pour laquelle ils (les bandits) les enlèvent facilement ».
Entre le marché, l’école et les conditions dans lesquelles sont éduqués ceux qui sont censés assurer la relève, tout porte à croire que le secteur éducatif est loin d’être une priorité.« Nous vivons dans la crainte parce que les élèves à cet âge ont tendance à tout copier. Et les plus curieux, c’est encore grave, quand ils voient les gars avec les bouteilles à la bouche, ils seront tentés de le reproduire. Et vous pensez qu’ils finiront comment ces enfants ? L’école et le marché ne peuvent pas aller ensemble », se plaint Madjilom Costa.
Pour le Directeur de l’école communale, ayant subi plusieurs pressions du fait de la publication des images relevant des conditions d’éducation dans lesquelles les élèves évoluent, « La direction fera de son mieux pour doter les salles de classes de nattes pour celles qui n’en ont pas encore. Nous n’avons pas les moyens pour les tables et bancs ». Comme quoi, nous sommes tenus d’attendre la levée de la grève pour apprécier l’évolution des conditions d’études de ces futurs cadres de la nation.