Au Sahel, dans un contexte de sécurité incertaine, les associations humanitaires ont une importance capitale. Mais, elles doivent faire face à des difficultés conséquentes.
Le 17 juillet, le bureau de Médecin sans frontières de la ville de Djibo, au Nord du Burkina Faso, est la cible de tirs répétés. Entre urgence et incertitudes sécuritaires, les différentes ONG humanitaires tentent chaque jour d’apporter leur aide au Sahel. Bien qu’il n’y ait pas de chiffres officiels, les djihadistes occuperaient plus de 40 % du territoire du Burkina Faso. Le pays connaît une dégradation évidente de la situation sécuritaire. Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), qui cite le gouvernement, fait état de plus de 2 millions de personnes déplacées au 31 mars 2023.
L’émergence des groupes armés terroristes a généré une crise humanitaire qui ne cesse de croître depuis 2012 sur toute la superficie du Sahel. C’est une situation d’urgence où trois pays sont la cible des groupes armés terroristes : le Burkina Faso, le Mali et le Niger. Le Haut-Commissaire de l’ONU, Filippo Grandi, s’est dit particulièrement inquiet de la situation dans le Sahel. La commission européenne annonce en mai 2024 que près de 24,7 millions de personnes dans le pays sont dans un besoin humanitaire avéré. La majorité de cette population est composée de femmes et d’enfants. Reporté sur la totalité des habitants du Sahel, cela représente un quart de la population sahélienne qui est dans une urgence alimentaire.
Opposition entre le gouvernement et les acteurs humanitaires
La nécessité de kits nutritionnels, d’abris d’urgence et d’assistance médicale est pressante. Le Conseil Norvégien pour les réfugiés estime qu’un manque de fonds et de fortes contraintes opérationnelles nuisent à répondre aux besoins des populations démunies. En témoignent les 6 tonnes de nourriture qui transitent chaque jour vers le nord et l’est du Burkina Faso. Celles-ci atteignent 1 % des populations dans la plupart des villes sous blocus terroristes. Des difficultés accrues par des mesures gouvernementales entravant le dispositif humanitaire : l’interdiction du transfert d’argent ou la mise en place de dispositif d’escorte de carburant et d’autres matières dangereuses perturbent considérablement les actions des ONG.
Autre fait marquant, l’expulsion du coordinateur des affaires humanitaires de l’ONU en 2022, par les autorités burkinabés, révèle une réelle opposition entre les autorités et les acteurs humanitaires. Il en est de même du gouvernement malien qui interdit purement et simplement, toute activité menée par les ONG opérant sur son territoire. Il en est de même au Niger, où l’arrêt des missions des ONG et des agences de l’ONU est demandé.
Ces mesures ont un impact considérable sur les secours humanitaires dans des pays où des millions d’habitants sont dans un besoin urgent. Enfin, l’insécurité due aux attaques terroristes empêche les travailleurs humanitaires d’aider les personnes les plus démunies, comme le relate la Protection civile et opérations d’aide humanitaire européenne. « De telles attaques menacent les efforts du PAM (Programme d’aide mondiale) sur le terrain en perturbant l’assistance alimentaire salvatrice tout en augmentant nos coûts opérationnels et en poussant nos fonds humanitaires à la limite » déclare Elvira Pruschini, représentante de pays pour le PAM.
Si les convois militaires qui percent les blocus permettent d’apporter de l’aide aux populations assiégées, ces opérations restent rares et subissent elles-mêmes des attaques terroristes. Dans un contexte de conflit opposant forces au pouvoir et groupes armés terroristes, les organisations humanitaires peinent à accomplir leurs missions. Le manque de moyens et l’aspect sécuritaire quasi inexistant dont devrait disposer ces acteurs entravent leurs actions. Ceci laisse présager une augmentation de la violence sur une population vulnérable qui fait déjà face à la brutalité des terroristes et l’absence de soutien des autorités en place.