À Bongor le Logone fait travailler des jeunes gens, dans la force de l’âge. Ils font exporter les marchandises que les commerçants tchadiens achètent au Cameroun et au Nigeria sur des pirogues. Quoique c’est un dur labeur, ce travail reste une aubaine pour ces jeunes qui y gagnent leur vie.
Des jeunes garçons piroguiers font l’import et l’export sur les rives du Logone. Le fleuve sépare la ville tchadienne Bongor à Yagoua, celle du Cameroun. Deux villes qui ont toujours utilisé la voie maritime pour se joindre. Des motos, des tricycles (appelés Rakcha au Tchad), du carburant, des jus et bien d’autres produits sont importés du Nigeria et du Cameroun vers Bongor, ville frontalière du Tchad. Et ce, sur des pirogues pendant la période de la baisse des eaux et sur des « hors-bord » pendant la période de la montée des eaux. Ces transactions import-export nourrissent bien des familles dans les deux localités frontalières.
Gassissou, venu très tôt afin d’exporter la marchandise d’un de ses clients, stationnée sur les côtes camerounaises, à Yagoua sur le Logone. « Il s’agit des bidons d’essence. Je les mets sur ma pirogue et les déplace du côté tchadien. Ce matin, j’ai eu la chance d’avoir au moins 90 bidons de 25 litres. Cela me fera 3 tours et je pourrai satisfaire dès cette matinée le propriétaire de la pirogue et mes besoins personnels », se réjouit le jeune Gassissou.
Adamou quant à lui, fait traverser des personnes et de marchandises sur sa pirogue. Il détient, dit-il, cet art de son père. « J’ai appris très tôt à me servir d’une pirogue. Il s’agit d’un héritage, car mon arrière-grand-père a eu à se servir du Logone pour nourrir ses enfants. Là, je trouve à satisfaire les besoins de ma famille. Dans l’après-midi, je pars fouiller mes filets afin de pêcher du poisson », a indiqué le jeune piroguier. Il ajoute qu’il est entre la pêche et la pirogue pour faire traverser le fleuve Logone aux habitants de Bongor et de Yagoua.
« L’ouverture du pont reliant Bongor à Yagoua, bannira le travail des piroguiers »
Les piroguiers de Bongor, sur la rive tchadienne du fleuve Logone, trouvent que l’initiative de construire un pont sur ledit fleuve est à saluer. Pour eux, cette route permettra à booster l’économie de la ville et fera d’elle une patte d’oie encore plus animée. Le piroguier Gassissou indique que le Tchad est un pays enclavé, avoir des voix de communication avec les pays voisins est une manière de s’ouvrir et de booster l’économie nationale afin de rendre la mobilité plus assurée. « C’est vrai que l’ouverture du pont va mettre un terme à notre métier de piroguier, mais cela va nous permettre de développer le commerce et ainsi changer de métier. Toutefois, avec ce pont, le Tchad aura accès plus facilement aux pays voisins et c’est très bénéfique pour nous, les premiers concernés », a-t-il ajouté.
« Ah, c’est un peu inquiétant, car l’inauguration du pont bannira notre activité de piroguier. Mais je me retournerai vers la pêche et la culture maraîchère avec ma femme. Je pense pouvoir acheter une moto avant l’inauguration de la route de Yagoua. Alors, je pourrais ainsi travailler et tenir le cap », indique Adamou, enthousiasme dans la voix.
Pour ces piroguiers, le pont fermera certes les opportunités qu’offre le fleuve, mais il ouvrira plus d’autres. Ils évoquent des ouvertures remarquables pour le chef-lieu de la Province du Mayo Kebbi-Est.