« La lecture, une bonne façon de s’enrichir sans voler personne », affirmait Arlette Laguiller. Une formule percutante, révélant à quel point la lecture peut être une source précieuse d’élévation personnelle. Pourtant, au Tchad, cette vérité semble perdre de sa force auprès d’une jeunesse confrontée à des difficultés quotidiennes.
Dans un pays où les préoccupations de base pèsent lourd, la lecture paraît souvent reléguée au rang de luxe inutile. « Lire, c’est pour ceux qui sont rassasiés », « ça ne va pas m’aider à sortir de la galère », « nous avons des problèmes plus importants dans ce pays »… Ces phrases, entendues ici et là, traduisent une perception de plus en plus répandue : celle d’une activité superflue face à l’urgence de la survie.
Pour beaucoup de jeunes, le seul contact avec les livres se limite au strict cadre scolaire, « et encore de manière fragmentaire ». Pourtant, comme le dit si bien Victor Hugo : « Lire, c’est boire et manger. L’esprit qui ne lit pas maigrit comme le corps qui ne mange pas. » Autrement dit, renoncer à la lecture, c’est affaiblir son esprit.
Un désintérêt aux lourdes conséquences
Les effets de ce désengagement ne tardent pas à se faire sentir : niveau général en chute libre, esprit critique en berne, vocabulaire appauvri, difficultés d’expression… Les conséquences sont nombreuses et souvent irréversibles. Pourtant, une lecture régulière, même modeste pourrait inverser la tendance car même si elle ne remplit pas l’estomac, elle alimente l’intellect, stimule l’imagination et aiguise le discernement.
Lire, c’est partir à l’aventure sans quitter son siège. C’est apprendre de nouvelles expressions, découvrir d’autres cultures, vivre des histoires, rencontrer des personnages marquants… C’est, le temps de quelques pages, s’évader et trouver du réconfort. Un luxe ? Non. Une nécessité. Une fenêtre ouverte sur l’espoir.
Des initiatives qui redonnent espoir
Malgré ce tableau sombre, une lueur persiste. Certains jeunes, conscients des bienfaits de la lecture, ont décidé de raviver la flamme. Plusieurs clubs portés par des passionnés de littérature ont ainsi vu le jour. Le plus emblématique reste le club JBS qui rassemble tous les quinze jours des lecteurs avides d’échanger autour d’un ouvrage choisi ensemble. Une dynamique prometteuse, symbole d’une jeunesse qui résiste à l’oubli culturel.
La lecture n’est peut-être pas la solution à tous les maux, mais elle est sans doute l’un des moyens les plus puissants de construire des esprits libres et critiques. Il est grand temps de lui redonner la place qu’elle mérite.
Sadia Ahmat Affono