La vie carcérale au Tchad est à déplorer. Il suffit de faire une immersion dans les cellules de garde à-vue des Commissariats de sécurité publique, des Brigades de gendarmerie et des prisons civiles pour constater. Entre insalubrité, précarité des cellules de détention, souci de traitement des dossiers judiciaires, les prisonniers tchadiens vivent un calvaire et les autorités peinent à trouver une solution définitive.
Mercredi 5 avril 2023, il est 11 heures. Nous avons fait le tour des commissariats de sécurité publique et des brigades de gendarmerie de la capitale. L’objectif est de constater les conditions de détention des personnes interpellées, avant de faire une visite à la prison de haute sécurité de Klessoum. Les réalités de ces milieux carcéraux sont déplorables.
Dans ces bagnes et cellules de garde-à-vue des commissariats et des Brigades, les conditions de détention sont presque les mêmes. C’est le même constat à la prison de haute sécurité, Maison d’arrêt et de correction de Klessoum (Mack), au Commissariat central de Police et à la section nationale de recherche judiciaire.
Et pourtant, dans un pays de droit, les cellules de détention doivent être entretenues par le ministère en charge de la justice et ses partenaires. Bien que la situation des détenus soit préoccupante, personne ne daigne faire des propositions pour l’amélioration de leurs conditions de détention. De l’avis d’O.D, prisonnier dans une cellule de la place, la vie carcérale au Tchad est pire. « Ce sont toutes les interdictions qui sont appliqués dans les prisons. Ailleurs, la prison rééduque mais chez nous, ce n’est pas le cas. Même les agents pénitenciers pensent que tous les prisonniers sont des voleurs ou brigands », a-t-il déploré. Un autre de renchérir que faire la prison au Tchad, ce n’est pas différent de Sodome et Gomor. « Il se passe beaucoup de choses dans les cellules. Les plus forts écrasent les plus faibles. Le traitement est mauvais. Là on ne parle pas de l’alimentation et la santé encore. On dit que la torture est abolie mais dans les prisons c’est plutôt le contraire. On est sans défense et même les agents pénitenciers, bafouent nos droits. Les hommes en tenue, n’en parlons pas », s’est-il lamenté.
Dans les cellules et quartiers des prisons, les difficultés sont les mêmes. L’insalubrité, la précarité des lieux de détention, les soucis liés au traitement des dossiers en justice, l’insuffisance de ressources financières et matérielles rendent difficile la gestion de ces établissements carcéraux. Le nombre total des détenus plus élevé, débordent la capacité d’accueil.
Selon un administrateur pénitencier qui requiert l’anonymat, les responsabilités sont partagées. « Les faits, les textes et lois sont là mais dans la pratique, c’est le contraire. Nous on obéit à l’ordre de notre hiérarchie. Ce qui concerne l’insalubrité, les prisonniers aussi peuvent s’organiser pour rendre propre leurs cellules. On n’a pas un budget pour gérer certaines situations donc c’est au ministère de la justice de coordonner certaines actions avec l’aide de ses partenaires », s’est-il dédouané.
Pour que cette situation s’améliore, l’ordre des avocats du Tchad, la Commission nationale des droits de l’homme (CNDH) et les ADH doivent prendre le dessus pour dénoncer les conditions d’incarcération des détenus qui vivent dans des conditions insalubres, au milieu des cafards. A noter également le manque d’intimité, la surpopulation, l’accès aux soins très compliqués et surtout une situation qui ne s’améliore pas.