Le Tchad a récemment inauguré le nouveau stade olympique Maréchal Idriss Déby Itno à N’Djaména, un projet pharaonique financé par la Chine. Ce stade, d’une capacité de 30 000 places, est présenté comme un symbole de coopération sino-tchadienne. Cependant, au-delà des apparences, cette infrastructure soulève des questions légitimes sur les priorités du pays.
Le Tchad traverse actuellement une période de crise économique et sécuritaire majeure. Le pays fait face à des défis sécuritaires liés aux conflits dans les pays limitrophes ainsi qu’aux conséquences du changement climatique, notamment l’accélération de la désertification et l’assèchement du lac Tchad. En 2024, le gouvernement tchadien estimait que près de 900 000 personnes pourraient arriver au Tchad d’ici la fin de l’année en raison des conflits régionaux.
De plus, le pays accueillait déjà quelque 450 000 réfugiés provenant du Soudan, de la République centrafricaine et du Nigéria. Sur le plan économique, le Tchad est un pays producteur de pétrole depuis 2003, mais il reste très dépendant de cette ressource. Cette dépendance économique rend le pays vulnérable aux fluctuations des prix du pétrole sur le marché mondial. Les risques à la baisse incluent des conflits régionaux et des catastrophes naturelles qui pourraient affecter encore davantage l’économie déjà fragile.
Dans ce contexte, la construction d’un stade olympique demeure une priorité discutable. D’autres infrastructures ont été construites par la Chine au Tchad, telles que le Palais de la Démocratie, siège de l’Assemblée nationale, et l’hôpital de l’Amitié Tchad-Chine. Cependant, ces projets ne répondent pas aux besoins urgents de la population tchadienne en matière de sécurité alimentaire, d’accès à l’eau potable ou de développement agricole. La construction du stade olympique Maréchal Idriss Déby Itno est donc perçue comme une tentative de légitimation politique et économique plutôt qu’une réponse aux besoins réels des Tchadiens.
Les véritables intentions derrière les investissements chinois
L’inauguration du stade olympique Maréchal Idriss Déby Itno a été l’occasion pour le président tchadien Mahamat Idriss Déby Itno de saluer la coopération sino-tchadienne. En réalité, cette coopération, a priori bienveillante, est loin d’être désintéressée. Les projets de construction au Tchad sont dirigés par des entreprises chinoises comme Shaanxi Construction Engineering Group Corporation Ltd en charge de la construction du stade olympique.
Cette situation contribue à l’exclusion économique des Tchadiens et renforce la dépendance du pays vis-à-vis de la Chine. Les investissements chinois ne visent pas seulement le développement du Tchad, mais aussi l’extension de leur influence économique dans toute l’Afrique, pour favoriser leur projet des nouvelles routes de la soie. La construction d’infrastructures comme le stade
olympique sert ainsi de paravent pour masquer les véritables intentions de Pékin. En dynamisant le continent africain, la Chine cherche à mieux exploiter les ressources énergétiques dont elle a besoin, comme elle l’a fait en Éthiopie avec la construction du métro d’Addis Abeba.
Le Tchad est riche en pétrole et autres ressources naturelles, ce qui en fait un partenaire stratégique pour la Chine. Les six accords de coopération entre le Tchad et la Chine signés en janvier dernier, couvrent des secteurs essentiels comme l’énergie, l’eau, l’agriculture, les infrastructures et la sécurité. Ces accords permettent à la Chine de renforcer sa présence sur le continent africain et de garantir l’accès à des ressources stratégiques. En échange, le Tchad bénéficie d’infrastructures modernes, mais au prix d’une dépendance économique accrue. En offrant des financements sous forme de dons et non de prêts, Pékin soigne son image de
partenaire désintéressé tout en tissant des liens de confiance avec les élites tchadiennes. Cette stratégie de « coopération gagnant-gagnant » vise à dissiper les soupçons d’impérialisme économique et à renforcer la légitimité de la présence chinoise en Afrique.
L’inauguration du stade olympique Maréchal Idriss Déby Itno est un symbole des ambitions économiques de la Chine au Tchad. Alors que le pays traverse une crise économique et sécuritaire majeure, les investissements chinois semblent plus destinés à asseoir leur emprise sur le continent qu’à répondre aux besoins réels des Tchadiens. Il est temps pour les dirigeants tchadiens de
repenser leurs priorités et de s’assurer que les infrastructures construites bénéficient réellement à la population locale plutôt qu’aux intérêts étrangers.