Sénat tchadien : les dissensions sur la répartition des postes plongent la Chambre dans l’impasse

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C’était une séance attendue, censée sceller l’installation complète du bureau du Sénat tchadien. Elle s’est finalement achevée dans la confusion et la discorde. Ce lundi 10 mars 2025, les membres de la Chambre haute étaient réunis pour entériner la répartition des postes, notamment celui très convoité de premier vice-président. Mais faute de consensus, la séance a été suspendue et reportée sine die.

Au cœur de la crispation : le rejet par plusieurs groupes parlementaires des propositions avancées concernant la vice-présidence et d’autres postes stratégiques du bureau. Le procès-verbal de la séance n’a même pas été signé, illustrant la profondeur du désaccord.

Le premier vice-président du Sénat est plus qu’un simple poste protocolaire. Il est perçu comme un rouage clé dans le fonctionnement de l’institution, susceptible de peser dans les équilibres politiques à venir. Mais le nom proposé pour occuper cette position a été jugé par beaucoup comme inadapté. « Il ne répond à aucun critère de compétence ni de représentativité », confie un sénateur, sous couvert d’anonymat.

La fronde s’est cristallisée au point de bloquer toute avancée. Les groupes parlementaires ont exigé une révision en profondeur des propositions. Le président du Sénat, Haroun Kabadi, a tenté une médiation en recevant tour à tour les présidents des différents groupes, sans parvenir à rapprocher les positions. Il a finalement décidé de suspendre la séance.

Des groupes en ordre dispersé

La répartition des postes au sein du bureau du Sénat devait refléter l’équilibre politique de la chambre, où coexistent plusieurs groupes parlementaires aux intérêts divergents. Le groupe Toumai, représenté par des figures telles que Théophile Bongoro, Lydie Beassemda et Bourkou Louise, a finalement accepté la proposition de répartition après s’être vu attribuer la deuxième vice-présidence.

Du côté des Refondateurs, coalition emmenée par Abderaman Koulamallah et regroupant l’UNDR, l’UDT et le RDP, le ton se veut conciliant. Malgré les réserves émises sur le choix de certaines personnes dans le bureau, le groupe appelle à un dialogue soutenu afin de préserver le consensus fragile qui doit régir les équilibres de la Chambre haute.

Le groupe des Démocrates, dirigé par Pahimi Padacké Albert et composé notamment du RNDT Le Réveil et de l’URD de Félix Nialbé, reste pour sa part en retrait, dénonçant ce qu’il considère comme une répartition déséquilibrée des postes clés. Ce groupe s’est opposé fermement aux propositions initiales, allant jusqu’à claquer la porte. Ses membres ont quitté la salle, dénonçant ce qu’ils qualifient de « mascarade ». Un geste spectaculaire, qui traduit l’ampleur du malaise.

Enfin, le groupe parlementaire du MPS, conduit par Achta Saleh Damane, tente de maintenir sa position de force. Majoritaire, le MPS est cependant confronté à une opposition déterminée, bien que fragmentée, qui entend peser dans les négociations à venir. Au-delà des enjeux de personnes, c’est toute la légitimité du Sénat qui est en jeu. Créée pour incarner une seconde chambre garante de l’équilibre institutionnel, l’institution se retrouve, à peine installée, confrontée à ses premières turbulences.

Le président Haroun Kabadi tente de temporiser. Après les consultations de ce samedi, il a convenu avec les présidents des groupes parlementaires que les discussions continueraient dans les prochains jours. Objectif : parvenir à un compromis permettant de débloquer la situation.

Mais l’affaire est loin d’être réglée. Car au-delà du choix d’un premier vice-président, c’est la question du partage du pouvoir et du respect des équilibres politiques dans le Tchad de demain qui se pose. En attendant, le Sénat reste paralysé. La date de la prochaine séance n’a pas été communiquée.

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