Mercenaires et sociétés militaires privées jouent un rôle clé dans les conflits africains, entre soutien aux États et déstabilisation. Leur présence soulève des enjeux sécuritaires, juridiques et éthiques.
Le 19 février 2025, les autorités roumaines ont mené treize perquisitions à Bucarest, Sibiu et Mureș, ciblant notamment le domicile d’Horatiu Potra, chef des « Roméos ». Ces derniers, initialement déployés en République démocratique du Congo (RDC) depuis 2022 en tant qu’instructeurs militaires, sont désormais soupçonnés de mercenariat au profit des forces armées congolaises. Les perquisitions s’inscrivent dans le cadre d’une enquête pour évasion fiscale et blanchiment d’argent, impliquant des transferts non déclarés de 7,2 millions de dollars en provenance d’Afrique et notamment de la RDC.
Le droit international définit le mercenaire comme un individu qui s’enrôle volontairement pour combattre dans un état dont il n’est pas le ressortissant, afin d’obtenir un profit personnel, notamment d’origine financière. L’Organisation des Nations Unies (ONU) et
l’Organisation de l’unité africaine (OUA) considèrent le mercenariat comme une activité criminelle. Cette activité est à différencier de celle des sociétés militaires privées (SMP). Les SMP sont des sociétés commerciales privées qui, dans le cadre d’opérations
militaires, proposent des prestations d’aide, de conseil et de soutien aux forces armées. Leurs employés ne participent pas directement aux combats, contrairement aux mercenaires.
Les mercenaires et SMP en Afrique
Des mercenaires interviennent en Afrique depuis les indépendances des États africains, avec des exemples notables dès les années 1960. En RDC, des mercenaires surnommés « les affreux » ont opéré, contribuant à la déstabilisation de la région. Aujourd’hui, plusieurs dizaines de milliers de mercenaires sont répartis dans divers pays en crise du continent. Ils participent à des conflits armés, souvent au service de sociétés militaires privées ou d’États. Leur présence est souvent associée à des stratégies de déstabilisation et d’exploitation des ressources naturelles. Le groupe Wagner, aujourd’hui Africa Corps, est impliqué depuis 2018 dans des activités criminelles en Afrique, particulièrement au Mali, au Soudan, au Mozambique, en Libye, en République centrafricaine et à Madagascar. Leurs interventions sont marquées par des exactions graves, notamment au Mali et en République centrafricaine, où les mercenaires russes sont accusés de massacres de civils, de tortures et de pillages de ressources naturelles comme l’or. Bien que le statut public ou privé du groupe Wagner était difficile à déterminer, Africa Corps est aujourd’hui officiellement lié à l’État Russe.
Les sociétés militaires privées (SMP) sont présentes en Afrique depuis les années 1990, avec Executive Outcomes, une entreprise sud-africaine, qui a marqué l’histoire du mercenariat sur le continent. Fondée en 1989, elle a opéré dans une trentaine de pays avant d’être dissoute en 1999 en raison de ses activités controversées. Aujourd’hui, plusieurs SMP continuent d’opérer en Afrique. Parmi les plus notables, Academi (États-Unis), Asgaard (Allemagne), Sadat (Turquie) et Agemira (Bulgarie) sont actives sur le continent. Leur présence soulève des questions éthiques et juridiques concernant la responsabilité et l’impact sur les conflits locaux.
Le mercenariat et l’essor des sociétés militaires privées en Afrique soulèvent des enjeux cruciaux en matière de souveraineté, de sécurité, de respect des droits humains et du droit international. Tandis que certains groupes exacerbent les conflits et exploitent les ressources, d’autres revendiquent un rôle d’appui stratégique aux États. Cette réalité complexe interpelle la communauté internationale sur la nécessité d’un cadre juridique renforcé et d’une régulation efficace pour limiter les dérives et préserver la stabilité du continent.