La justice pénale internationale est lente, a reconnu jeudi à Kinshasa, Mame Mandiaye Niang, procureur adjoint de la Cour pénale internationale (CPI). Mais, a-t-il assuré devant des journalistes congolais sceptiques quant à son efficacité, elle « ne se décourage pas ».
La République démocratique du Congo avait déjà saisi en 2004 la CPI, qui avait ouvert une enquête et prononcé trois condamnations définitives pour des crimes commis dans l’est du pays, en proie à des violences armées depuis près de 30 ans. La juridiction a de nouveau été saisie cette année par Kinshasa, qui vise en particulier le M23 (« Mouvement du 23 mars »). Il s’agit d’une rébellion soutenue par le Rwanda, selon de nombreuses sources, qui s’est emparée depuis deux ans de pans de territoire dans le Nord-Kivu. En juin, le procureur de la CPI avait annoncé son intention de procéder à un « examen préliminaire ».
Il faut « clarifier » si cette deuxième saisine concerne « une criminalité nouvelle ou le continuum de la criminalité déjà dénoncée », a déclaré M. Niang lors d’une conférence de presse, à l’issue d’une visite de trois jours en RDC. « Nous évaluons la situation », a-t-il dit.
Des questions des journalistes ont ensuite tourné autour du moment où des poursuites seraient engagées. « Notre approche ne peut pas être la vôtre, la conclusion ne peut pas venir avant les investigations », a relevé le procureur adjoint. Puis, interpellé sur la lenteur des procédures et l’impact limité de l’action de la CPI « surtout quand on se place du côté des victimes », M. Niang a répondu : « je dois humblement être d’accord avec vous ». « Ce qu’on fait est loin, très loin d’être assez, ni en termes de rythme, ni en termes d’impact ».
Mais, a-t-il poursuivi, il faut voir « la criminalité dont nous nous occupons : génocide, crime contre l’humanité, crime de guerre… », des formes de criminalité « qui font souvent des milliers » voire « des millions de victimes ». La CPI vise surtout les « auteurs intellectuels des crimes, les leaders, qui souvent sont armés, puissants, difficilement accessibles », a également souligné M. Niang.
« Ce qui est rassurant, c’est que ce système de justice ne se décourage pas, qu’il prendra le temps qu’il prendra, mais rendra justice aux victimes », a-t-il estimé, en rappelant que les crimes relevant de la CPI étaient imprescriptibles.
La justice internationale est donc « utile pour ces victimes, mais aussi pour l’humanité entière », selon le procureur adjoint. Elle porte « le message » selon lequel « on ne peut pas tuer impunément des personnes, particulièrement au titre de ce qu’elles sont, de ce qu’elles pensent ou de leurs croyances ».