Ce 21 mars 2025 marque la Journée Mondiale de la trisomie 21, une occasion de sensibiliser à l’inclusion et aux droits des personnes atteintes de cette condition génétique. Pourtant, au Tchad, cette journée passe souvent inaperçue. Le Centre d’Éducation Spécialisée pour Enfants en Besoin Rééducatif (CESER), unique structure du pays dédiée aux enfants déficients intellectuels, tente tant bien que mal de leur offrir une prise en charge adaptée malgré un manque criant de moyens.
Créé en 1998 avec seulement 10 enfants, le centre CESER accueille aujourd’hui 82 enfants, tandis que plus de 120 ont été réinsérés dans leurs familles et 57 dans des petits métiers. Depuis sa création, le centre a sensibilisé au moins 2 060 personnes dans plusieurs provinces du pays. Mais face à l’ampleur des besoins, il reste seul. « Nous avons identifié plus d’enfants trisomiques dans les provinces que dans d’autres catégories de déficiences. Malheureusement, ces enfants sont souvent rejetés, marginalisés ou même assimilés à des êtres maléfiques », déplore le coordonnateur du programme dudit centre, Adoumkidjim Naiban.
En l’absence d’un réseau national de structures spécialisées, le centre a mis en place une approche innovante : constituer des parents en points focaux pour qu’ils puissent défendre leurs enfants contre les discriminations. Mais cela ne suffit pas à pallier le manque de centres spécialisés dans le pays.
Le CESER ne se limite pas à un enseignement classique. Il propose un programme de réhabilitation, avec trois volets, notamment le scolaire pour les bases éducatives; le monde du travail pour favoriser l’autonomie; et l’éducation itinérante, qui permet un suivi des enfants dans leurs familles. Le centre dispose d’éducateurs spécialisés, mais il manque cruellement de psychiatres, d’orthophonistes et de kinésithérapeutes. « Nous n’avions qu’un seul psychiatre et malheureusement il est décédé. Aujourd’hui, ces enfants n’ont plus de suivi médical adapté », regrette le coordonnateur.
Une journée qui passe sous silence au Tchad
Contrairement à d’autres événements comme la Journée Mondiale de la santé mentale, cellede la trisomie 21 est rarement célébrée au Tchad. Faute de moyens, le centre se limite à offrir des cadeaux aux enfants pour marquer l’occasion. « Pourtant, ces enfants ont le droit de voir leur journée célébrée comme il se doit, à l’instar des autres enfants du monde », souligne le coordonnateur.
Le silence autour de cette journée reflète une réalité plus préoccupante : au Tchad, les enfants atteints de trisomie sont souvent cachés par leurs familles, par honte ou par peur du regard social. « Beaucoup pensent encore qu’avoir un enfant trisomique est une malédiction. Pourtant, c’est un accident génétique qui peut arriver à n’importe quelle famille, partout dans le monde », insiste-t-il.
Un appel au gouvernement et aux partenaires
Face à cette situation alarmante, le CESER interpelle les autorités tchadiennes et les partenaires internationaux, notamment l’UNICEF qui œuvre pour la protection de l’enfance.
« Il est temps que le gouvernement prenne en main la question de l’éducation spécialisée et de l’inclusion des enfants trisomiques. Nous ne pouvons pas rester le seul centre du pays. Il faut des moyens pour embaucher des spécialistes, sensibiliser la population et offrir à ces enfants une réelle chance d’épanouissement », plaide le coordonnateur.
La Journée Mondiale de la trisomie 21 devrait être un moment fort de mobilisation nationale, mais elle reste encore ignorée. Ces enfants ont droit à l’éducation, à la dignité et à la vie. Il est temps d’agir.