Deux officiels guinéens ont été écroués après avoir déclaré que les patrons de médias très suivis avaient été achetés par la junte pour se montrer conciliants envers elle, a indiqué mercredi un de leurs collègues.
Djènè Diaby et Tawel Camara, deux des 13 commissaires de la Haute autorité de la communication (HAC), régulatrice des médias, ont passé la nuit à la prison centrale de Conakry après avoir été inculpés pour diffamation contre le chef de l’État et placés sous mandat de dépôt, a dit à un correspondant de l’AFP un autre commissaire, Amadou Touré.
Ils ont comparu mercredi, 19 juin devant un tribunal de Conakry, ont présenté des excuses et dit n’avoir aucune preuve de ce qu’ils avaient affirmé, a rapporté un correspondant de l’AFP. Leur procès a été renvoyé à jeudi. Djènè Diaby et Tawel Camara ont fait scandale en expliquant le 12 juin devant des journalistes comment quatre radios et deux télévisions privées à forte audience s’étaient retrouvées interdites fin mai.
Djènè Diaby et Tawel Camara ont reproché aux patrons d’avoir ignoré les avertissements de la HAC et de n’avoir pas mis en sourdine les critiques à l’encontre du pouvoir alors qu’ils avaient, selon eux, touché de l’argent de la présidence du général Mamadi Doumbouya.
Djènè Diaby a dit ce jour-là n’avoir « aucune compassion » pour ces patrons de presse, selon un enregistrement de ses propos diffusé sur les réseaux sociaux. « Chacun d’entre eux, les patrons, ils ont eu de l’argent là-bas, à la présidence, chacun d’entre eux a signé », a-t-elle dit. Les deux commissaires ont décrit les membres de la junte comme indifférents à la légalité et capables de tout pour conserver le pouvoir, y compris « égorger » leur mère selon le mot de Djènè Diaby. La HAC a suspendu les deux commissaires pour « faute lourde » le 13 juin.
Les directeurs des groupes Hadafo Médias, Djoma Média et Fréquence Médias ont annoncé porter plainte contre les deux officiels. Leurs médias font partie des six radios et télévisions auxquelles les autorités ont retiré leur agrément le 22 mai. Les autorités se sont contentées d’invoquer un « non-respect du contenu des cahiers des charges » et des « dérapages réguliers ». Il s’agit du dernier tour de vis imposé aux médias et aux libertés depuis que les militaires ont pris le pouvoir par la force en 2021.