À Abidjan, le Tchad joue sa carte diplomatique à la BAD

Les couloirs du Sofitel Hôtel Ivoire bruissent déjà de conciliabules. À la veille de l’ouverture officielle des Assemblées annuelles de la Banque africaine de développement (BAD), prévues du 27 au 30 mai à Abidjan, la capitale économique ivoirienne s’impose comme l’épicentre des tractations économiques du continent.

Plus de 6 000 participants sont attendus : chefs d’État, ministres, gouverneurs de banques centrales, bailleurs, universitaires et journalistes. Une édition à la portée particulière, marquée par la fin du mandat du Nigérian Akinwumi Adesina à la tête de l’institution, et par l’élection de son successeur. À cette occasion, le Tchad entend faire entendre sa voix.

La délégation tchadienne est conduite par Mme Fatime Haram Acyl, ministre déléguée auprès du ministre des Finances, en charge de l’Économie, du Plan et de la Coopération internationale. À peine arrivée ce 26 mai, elle a pris part à la réunion stratégique de la Circonscription Afrique Centrale, regroupant six pays membres (Cameroun, RCA, Congo, RDC, Burundi, Tchad), afin d’harmoniser les positions et défendre des intérêts communs face aux grands argentiers du continent.

Première victoire diplomatique : le Tchad décroche le poste d’Administrateur Suppléant au Conseil d’administration de la Banque pour la prochaine mandature, dans le cadre du système de rotation. C’est Akhouna Kasser, haut fonctionnaire tchadien rompu aux arcanes de la finance publique, qui a été désigné pour occuper ce poste stratégique, renforçant ainsi la visibilité du pays dans les sphères décisionnelles de la BAD.

Mais le véritable enjeu, plus discret, se joue dans les marges : la candidature d’Abbas Mahamat Tolli à la présidence de la Banque. Ancien ministre et ex-gouverneur de la BEAC, l’économiste tchadien bénéficie d’un profil technique solide et d’un réseau panafricain établi. La ministre tchadienne multiplie, depuis ce matin, les rencontres bilatérales et les discussions informelles pour rallier des soutiens. Le jeu est ouvert, les alliances se nouent dans le non-dit des salons privés.

Parallèlement, les discussions portent sur l’état d’avancement des projets en cours dans la région, les opportunités de recrutement au sein de la Banque et les défis de gouvernance auxquels font face les institutions africaines de développement. Le tout sous le thème de cette édition : « Tirer le meilleur parti du capital de l’Afrique pour favoriser son développement »,
slogan ambitieux qui renvoie aussi bien au potentiel humain, naturel, financier que commercial du continent.

Demain, place à l’ouverture solennelle, en présence des chefs d’État invités et du président sortant Adesina, qui tirera sa révérence après dix ans à la tête de la première banque de développement du continent. Pour le Tchad, l’heure est à la manœuvre diplomatique, dans un contexte de recomposition des équilibres africains.

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