Dans l’ombre des blanchisseurs traditionnels qui redonnent vie aux vêtements au bord des rivières, se cache un autre savoir-faire tout aussi essentiel : celui des fabricants de savon artisanal. Ces artisans jouent un rôle clé dans l’efficacité du lavage grâce à des savons conçus avec soin pour répondre aux exigences de ce métier ancestral.
Le processus de fabrication est minutieux. Tout commence par le choix des ingrédients, souvent locaux et accessibles : natron, détergents, eau de javel… Ces matières premières sont mélangées, dosées avec précision, puis malaxée pour obtenir un savon aux propriétés spécifiques.
Mais cette expertise n’est pas issue d’une formation formelle. La plupart de ces fabricants apprennent sur le tas, guidés par l’expérience et la transmission orale. C’est le cas de Abdoulaye Hassan Daoud, un fabricant installé au bord du fleuve Chari : « Il y a des gens qui ont des doctorats, mais ne trouvent pas de boulot, or nous, grâce à notre esprit de créativité, on gagne notre vie au quotidien ». Cette absence de formation professionnelle, bien que compensée par leurs idées ingénieuses, entraîne parfois des défis techniques ou des pertes lors de la fabrication.
Le savon produit, riche en agents nettoyants et adapté aux tissus résistants, est particulièrement sollicité par les blanchisseurs. Ces derniers louent les bienfaits de ce produit, qui permet non seulement d’enlever les salissures les plus tenaces, mais aussi de préserver les vêtements. « Ce savon est notre seul allié, grâce à sa durabilité et son efficacité », confie Ali, la trentaine révolue.
Cependant, le métier de fabricant de savon artisanal reste difficile. Entre le coût croissant des matières premières, leur condition de travail assez rude et l’absence de reconnaissance, ces artisans s’en sortent grâce aux revenus journaliers qu’ils tirent de la vente de leur production : « C’est vrai qu’on ne vend pas plus de trois cartons par jour, mais le peu qu’on gagne nous permet de nous occuper de notre famille », rajoute Daoud.
Malgré tout, pour ces fabricants, ce métier est un choix et souvent une passion. Ils contribuent, à leur manière, au maintien de pratiques traditionnelles tout en répondant à des besoins essentiels. Leur travail, bien qu’invisible pour beaucoup, est au cœur de la chaîne de valeur du blanchissage traditionnel.
Ousmal Jumelia